Stratégie

Union européenne : adoption de la directive sur les travailleurs des plateformes numériques

Par Agnès Redon | Le | International

Le 11 mars 2024, le Conseil de l’UE a trouvé un accord sur une directive visant à renforcer les droits des travailleurs des plateformes numériques.

Union Européenne : la directive sur les travailleurs des plateformes numériques adoptée - © D.R.
Union Européenne : la directive sur les travailleurs des plateformes numériques adoptée - © D.R.

Les dispositions concernent 28 millions de travailleurs et ont trouvé un accord de vingt-cinq États membres. L’Estonie et la Grèce ont changé d’avis pour finalement approuver l’accord. La France a quant à elle voté contre, tandis que l’Allemagne s’est abstenue.

« Une gestion des ressources humaines plus transparente »

« La directive rendra l’utilisation des algorithmes aux fins de la gestion des ressources humaines plus transparente, en assurant que les systèmes automatisés sont supervisés par un personnel qualifié et que les travailleurs ont le droit de contester les décisions automatisées. Elle contribuera en outre à déterminer correctement le statut professionnel des personnes exécutant un travail via une plateforme, en permettant à celles-ci de bénéficier de tout droit en matière de travail auquel elles peuvent prétendre », précise un communiqué du Conseil. 

Le projet de directive instaure une présomption légale qui permettra de déterminer le statut d’emploi « correct » des personnes travaillant sur les plateformes numériques :

  • les États membres établiront une présomption légale d’emploi dans leurs systèmes juridiques, qui sera déclenchée lorsque des faits indiquant un contrôle et une direction sont découverts,
  • ces faits seront déterminés conformément au droit national et aux conventions collectives, tout en tenant compte de la jurisprudence de l’UE,
  • les personnes travaillant sur les plateformes numériques, leurs représentants ou les autorités nationales pourront invoquer cette présomption légale et prétendre qu’elles sont mal classées,
  • la plateforme numérique devra prouver qu’il n’y a pas de relation de travail.

L’accord ne signifie pas que tous les livreurs et conducteurs des plateformes basculeront automatiquement sous le statut de salarié. Il prévoit que les travailleurs des plateformes puissent contester leur statut, pour « accéder plus facilement aux droits dont ils bénéficient en vertu du droit de l’Union en tant que salariés »indique la Commission

Une « victoire » pour la Confédération européenne des syndicats 

Dans un communiqué publié le 11 mars 2024, la Confédération européenne des syndicats (CES) qualifie cet accord de « victoire ».

« Nous avons gagné. Les syndicats ont fait la différence. Des solutions sont enfin proposées pour régler le scandale du faux travail indépendant. La décision d’aujourd’hui signifie que des millions de personnes travaillant sur des plateformes numériques ne seront plus privées du salaire minimum, des indemnités de maladie, des congés payés et de la sécurité sociale. Ce n’est pas trop tôt : le nombre de personnes travaillant via des plateformes a augmenté de plus de 30 % au cours des 800 jours, depuis que la Commission a lancé cette législation.

Pendant cette période, les travailleurs et leurs syndicats se sont battus bec et ongles pour maintenir la pression. Il est désormais temps pour les gouvernements nationaux de se préparer à une mise en œuvre rapide. »

Le Parlement européen entérinera définitivement le projet de directive lors d’une séance plénière prévue en avril 2024. Les États membres auront ensuite deux ans pour intégrer ce texte législatif.