Pouvoir d’achat : Michelin déploie une « garantie de salaire décent » pour ses 132 000 employés
Par Alban Garel | Le | Salaires
Michelin veut lancer une innovation sociale liée à la rémunération : une « garantie de salaire décent » pour tous les employés du groupe à l'échelle mondiale. Le P-DG Florent Menegaux a précisé le dispositif.
Le déploiement de ce « salaire décent » garanti aux salariés du groupe Michelin, quel que soit leur pays, a une double vocation :
- une rémunération au moins équivalente au « living wage » (défini par l’ONU comme la rémunération permettant à chaque salarié de subvenir aux besoins essentiels de sa famille (alimentation, logement, transport, éducation des enfants, frais de santé, …),
- constituer une épargne de précaution et d’acquérir des biens de consommation.
Le P-DG de Michelin, Florent Menegaux, évoque dans Le Parisien en date du 17 avril 2024 un salaire décent « de deux fois le Smic à Paris, et de + 20 % du Smic à Clermont-Ferrand », au siège de l’entreprise.
Des chiffres précis de la firme transmis à l’AFP font état de 39 638 euros par an pour un salaire « décent » brut à Paris, soit environ 2500 euros net par mois. Et de 25 356 euros à Clermont-Ferrand, soit 1650 euros net par mois.
« Le salaire minimum n’est pas suffisant en France », selon Florent Menegaux
« Nous vivons dans un environnement turbulent. Nous passons d’un monde à l’autre, industriel à postindustriel, comme au moment de la Renaissance. Face aux bouleversements de la société, à la question de rémunération du travail, structurellement insuffisante, mais aussi à l’urgence climatique, et à tous les défis auxquels nous devons faire face, les entreprises ont un rôle à jouer », déclare Florent Menegaux.
- « Nous nous sommes posés la question : sommes-nous sûrs, dans les 175 pays où nous opérons, de rémunérer correctement nos collaborateurs ? Nous nous sommes affranchis des paramètres de minimum légal pays par pays et fait accompagner par une ONG, Fair Wage Network.
- Nous sommes arrivés à la conclusion qu’un salaire décent devait permettre à une famille de quatre personnes, deux adultes et deux enfants, de se nourrir, mais aussi de se loger, de se soigner, d’assurer les études des enfants, de se constituer une épargne de précaution, d’envisager des loisirs et des vacances. »
Interrogé sur le maintien du salaire décent en cas de dégradation du contexte économique, le P-DG de Michelin indique qu’il est « non-négociable ».
« Si notre activité économique se réalise au détriment du salaire décent, c’est que nous n’avons pas rempli notre mission. La performance de l’entreprise ne doit pas se construire sur la misère sociale. Cela conduit dans une impasse », déclare Florent Menegaux.
Sur les freins qui empêchent le développement du salaire décent en France, Florent Menegaux évoque le rôle « contre-productif » des exonérations de charges sur les bas salaires, « qui rendent les augmentations des salariés au Smic tellement coûteuses que les entreprises y renoncent ».
Réaction de CGT Michelin
« • Avec un résultat opérationnel 2023 en hausse de 5,2 % par rapport à 2022, le dividende qui sera versé aux actionnaires en juin prochain va représenter près d’un milliard d’euros, soit plus de 7200 euros par salarié du groupe, alors que l’entreprise n’a accordé que 20 ou 30 euros par mois d’augmentation générale pour 2024.
• Pour arriver à son salaire au-dessus du Smic, Michelin englobe des primes aléatoires qui fluctuent d’une année à l’autre voire d’un trimestre à l’autre. Et ces primes sont plus faibles pour les plus bas salaires ;
• En réalité, chez les ouvriers, les nouveaux embauchés gagnent à peine plus que le Smic. Si le salaire était si décent chez Michelin, pourquoi a-t-il tant de mal à recruter et à garder les nouveaux embauchés ? Pour la CGT Michelin, aucun salaire ne devrait être en dessous de 2200€ net. ;
• Cette opération de communication du P-DG de Michelin vise à faire diversion, alors qu’il supprime en ce moment 1500 emplois en Allemagne et 1400 au Etats-Unis, et qu’il serait question de restructuration de certains sites français voire même de fermetures d’usines. »
Le programme de protection sociale « Michelin One Care »
La mise en œuvre effective du salaire décent vient compléter le déploiement en cours d’un socle universel de protection sociale dans le cadre du « Programme Michelin One Care ». Celui-ci garantit à tous les salariés du groupe dans le monde un ensemble d’avantages sociaux, autour de 3 priorités :
• offrir du temps pour accueillir un enfant, avec la mise en place d’un congé maternité/adoption de 14 semaines minimum et d’un congé paternité/adoption de 4 semaines minimum, rémunérés à 100 % ;
• protéger la famille d’un salarié décédé, avec le versement d’un capital décès d’au moins un an de salaire réel et d’une rente d’éducation pour les enfants jusqu’à la fin de leurs études supérieures et quelle que soit l’ancienneté du salarié ;
• proposer un accès à un programme de santé pour tous les salariés et leur famille, via une couverture santé couvrant l’hospitalisation, les soins maternité, les consultations et soins ambulatoires.