Faute grave, définition, procédure et conséquences pour le salarié
Par Steven Philémond | Le | Protection sociale
Le licenciement d’un salarié peut avoir lieu s’il commet une faute simple, lourde ou grave. Prononcé par l’employeur qui applique son pouvoir disciplinaire, le renvoi pour faute grave doit avoir une cause réelle et sérieuse. Par ailleurs, sa gravité est telle qu’elle entraîne la rupture immédiate de son contrat de travail afin de ne pas entraver la bonne marche de l’entreprise.
Qu’entend-on par faute grave ?
Désignant étymologiquement une « action de faillir, un manquement », la faute, dans le milieu professionnel, prend une dimension plus impactante sur l’avenir des salariés.
Selon la chambre sociale de la Cour de cassation, la faute grave est présentée comme des faits imputables à un salarié et qui occasionnent une violation d’une obligation contractuelle. Occasionnant une mise à pied conservatoire, elle rend impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise (Cass. Soc., 27 septembre 2007, no 06-43 867). Étudiée en fonction des circonstances, la faute grave peut être reconnue même si elle est commise pour la première fois.
Certains comportements sont considérés comme un motif de faute grave, à savoir :
- une absence injustifiée à son poste de travail,
- un état d’ivresse constaté durant les heures de travail,
- une indiscipline d’un salarié envers son employeur,
- le refus d’effectuer une tâche prévue dans le contrat de travail,
- le harcèlement, des injures ou une violence envers tout membre de l’entreprise, etc.
La faute grave ne doit pas être confondue à la faute lourde qui se présente comme l’intention de nuire sciemment et volontairement à l’employeur ou à l’entreprise. Enfin, elle est différente de la faute simple qui est considérée comme une erreur commise par le salarié dans l’exécution de son travail.
Il est possible de la prouver en s’appuyant sur des attestations, des courriers ou des lettres de réclamation des clients. L’utilisation d’images ou de conversations téléphoniques est également autorisée à condition qu’elles n’aient pas été prises à l’insu de l’intéressé. En général, les fautes graves ne sont pas plus difficiles à démontrer que les fautes simples, car il suffit d'apporter des éléments matériels qui étayent les propos de l’employeur.
Comment procéder au licenciement d’un salarié pour faute grave ?
Le licenciement pour faute grave doit intervenir dans les deux mois qui suivent les agissements du salarié ou dès que l’employeur prend connaissance des faits qui lui sont reprochés. Autrement, les juges considèrent qu’une attente trop longue fait perdre à la faute son caractère de gravité. En général, la procédure se déroule dans le respect d’étapes parfaitement définies.
Vérification des faits et notification de mise à pied par l’employeur
Elle consiste à collecter des informations auprès d’autres salariés, de clients, de prestataires ou des supérieurs hiérarchiques afin d’être présentées au juge. Toutefois, la jurisprudence interdit d’avoir recours à des stratagèmes ou à de la surveillance clandestine pour confondre le salarié. Enfin, il est vivement recommandé de préciser les dates et heures auxquelles ont eu lieu les incidents.
Prise en tant que précaution en attendant la décision, la mise à pied du salarié est une tâche qui incombe au DRH. Lors d’une mise à pied, le salarié reçoit en main propre la lettre qui l’en informe et il lui est demandé d’en accuser réception. Durant la procédure, il est déconseillé que le DRH reste seul en tête-à-tête avec le salarié de peur qu’il ait un comportement déplacé.
Convocation, entretien du salarié, licenciement et établissement des soldes
Après sa mise à pied, le salarié est convoqué par l’employeur via un courrier. Cette lettre doit notamment indiquer :
- l’objet qui est l’entretien préalable au licenciement,
- la date et l’heure,
- la possibilité pour le salarié de se faire assister par un collègue, peu importe sa catégorie professionnelle ou un conseiller extérieur (service gratuit).
En cas de convocation à un entretien qui tarde à venir, la mise à pied perd son caractère conservatoire et devient une sanction disciplinaire. Dès lors, il est impossible de licencier le salarié, car il est déjà sanctionné pour les faits qui lui sont reprochés. À la fin de l’entretien, l’employeur dispose d’un délai d’un mois pour faire parvenir une lettre de licenciement au salarié.
Il est recommandé d’utiliser la terminologie « licenciement sans préavis ou indemnités ». Lorsque le renvoi est notifié, le solde du salarié doit être préparé (rémunération du mois, indemnité compensatrice de congés payés, prime annuelle…).
Le salarié peut-il faire un recours en cas de licenciement pour faute grave ?
S’il souhaite contester son licenciement pour faute grave, le salarié peut, à l’aide de son avocat, saisir le Conseil des Prud’hommes. D’après l’article L.1235-2 du Code du travail, lorsqu’il constate une irrégularité dans la procédure qu’a suivie l’employeur, le salarié peut demander au juge prud’homal une indemnité ne pouvant excéder un mois de son salaire.
Quand une de ses libertés fondamentales a été violée, il peut demander la nullité de son licenciement et avoir droit à une indemnité supérieure à ses six derniers mois de salaire (article L.1235-3-1 du Code du travail). Enfin, en l’absence d’une cause réelle et sérieuse de licenciement, le salarié a droit à une indemnité selon son ancienneté.
En cas de litige entre un salarié et son employeur, il revient au juge de déterminer le niveau de gravité de la faute. Toutefois, il ne peut le faire qu’en faveur du salarié. Il peut donc prononcer une faute grave plutôt qu’une faute lourde ou une faute simple au lieu d’une faute grave (Cass. Soc., 16 septembre 2020, no 19-10 583).