Définitions

Barème macron

Par Steven Philémond | Le

Le droit du travail a connu de nombreuses évolutions grâce aux ordonnances Macron du 22 septembre 2017. L’une des principales réformes a été la mise en place d’un barème encadrant le versement d’une indemnité au salarié pour la réparation du préjudice lié à un licenciement abusif. L’application du barème Macron a été à l’origine d’une grande incertitude juridique liée à des applications contradictoires au niveau de certains Conseils de Prud’hommes et certaines Cours d’appel.

Calcul du barème macron - © D.R.
Calcul du barème macron - © D.R.

Qu’est-ce que le barème Macron ?

En droit du travail, le barème Macron fixe l’indemnité (dommages et intérêts) à verser au salarié en cas de licenciement abusif. Lorsque le contentieux est porté devant un Conseil des Prud’hommes, le juge qui estime que le congédiement n’est pas motivé par une cause réelle et sérieuse peut proposer à l’entreprise de réintégrer le collaborateur dans son effectif actif. Le Code du travail prévoit que l’employé conserve alors tous les avantages acquis de son poste avant le licenciement. Cependant, si une des parties refuse cette solution, le Conseil des Prud’hommes peut décider de l’octroi d’une indemnité au salarié à la charge de l’employeur.

Le droit spécialisé dispose que cette solution de réparation du préjudice causé à l’employé vient compléter le bénéfice d’une indemnisation de licenciement prévue dans le contrat de travail ou la convention collective. Tout en respectant les limites maximales et minimales prévues dans l’article L. 1235-3 du Code du travail, le juge détermine le montant adéquat à octroyer à l’employé. Dans son calcul, l’autorité juridictionnelle peut tenir compte des autres indemnités de licenciement versées à l’occasion de la rupture de contrat, à l’exception de l’indemnité légale de licenciement prévue par l’article L. 1234-9 du Code du travail.

Le montant de la réparation calculé selon le barème Macron est cumulable, dans la limite des plafonds légaux, avec les indemnités attribuées au salarié lors d’un licenciement pour motif économique. Les renvois pour motif économique peuvent être constatés dans les cas suivants :

  • non-respect de la priorité de réembauche,
  • absence de création d’un comité social et économique dans une entreprise assujettie à cette obligation,
  • non-respect par l’employeur des procédures d’information de l’autorité administrative compétente ou de consultation des représentants du personnel.

L’introduction du barème Macron pour réformer le droit du travail a globalement permis une harmonisation plus poussée de l’indemnisation des employés en cas de rupture des CDI et des CDD sur le territoire national.

Definition Macron - © D.R.
Definition Macron - © D.R.

Le tableau d’indemnisation du barème Macron

L’indemnisation en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse doit respecter certains planchers et plafonds en fonction de l'ancienneté du salarié et de l’effectif de son entreprise. Si la société emploie habituellement plus de 11 salariés, voici les montants minimaux et maximaux prévus par le barème Macron pour réparer le préjudice causé.

Nombre d’années complètes d’ancienneté du salarié dans l’entreprise

Montant minimal de l’indemnité (en mois de salaire brut)

Montant maximal de l’indemnité (en mois de salaire brut)

0

-

1

1

1

2

2

3

3,5

3

3

4

4

3

5

5

3

6

6

3

7

7

3

8

8

3

8

9

3

9

10

3

10

11

3

10,5

12

3

11

13

3

11,5

14

3

12

15

3

13

16

3

13,5

17

3

14

18

3

14,5

19

3

15

20

3

15,5

21

3

16

22

3

16,5

23

3

17

24

3

17,5

25

3

18

26

3

18,5

27

3

19

28

3

19,5

29

3

20

30 et plus

3

20

Si l’entreprise compte moins de 11 salariés, voici le tableau Macron à utiliser pour déterminer le montant idéal d’indemnisation.

Nombre d’années complètes du salarié dans l’entreprise

Montant de l’indemnité minimale

(en mois de salaire brut)

0

-

1

0,5

2

0,5

3

1

4

1

5

1,5

6

1,5

7

2

8

2

9

2,5

10

2,5

Pour la même ancienneté, les montants maximaux pour l'indemnité de licenciement abusif sont les mêmes que ceux prévus pour une entreprise de plus 11 salariés.

Definition barème Macron - © D.R.
Definition barème Macron - © D.R.

Quels sont les cas de dérogation à l’application du barème Macron ?

Le barème Macron n’est pas applicable si le litige est associé à l’un des cas de nullité suivants :

  • violation d’une liberté fondamentale,
  • licenciement discriminatoire,
  • faits de harcèlement moral ou sexuel,
  • licenciement dû à une action en justice pour des contentieux liés à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ou une dénonciation de crimes et délits,
  • licenciement d’un salarié protégé en raison de l’exercice des fonctions liées à son mandat (employé siégeant au comité social et économique par exemple),
  • licenciement d’un salarié en méconnaissance de la protection des salariées enceintes, des employés victimes d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle ou des salariés durant les congés liés à la naissance ou l’adoption d’un enfant.

Ici, le montant de l’indemnisation n’a pas une limite maximale. Il s’ajoute, le cas échéant, à l’indemnité de licenciement prévue par une disposition légale générale ou sectorielle, une convention collective ou un contrat de travail. Le salarié perçoit également la rémunération normalement due pendant la période couverte par la nullité constatée par le Conseil des Prud’hommes. Le montant de l’indemnité octroyée par le juge ne peut être inférieur à celui des salaires des six derniers mois.

Le règlement des contestations juridiques liées à l’application du barème Macron

Au moment de son élaboration, le barème Macron a fait l’objet d’une saisine de Conseil constitutionnel par des députés qui a finalement confirmé en mars 2018 la conformité de la disposition avec les textes constitutionnels. Le Conseil des Prud’hommes de Paris (en janvier 2018) et le Conseil des Prud’hommes de Lyon (en décembre 2018) ont refusé d’appliquer les tableaux Macron pour l’indemnisation des certains salariés victimes de licenciement abusif. Le motif invoqué par ces Conseils des Prud’hommes est l’inconventionnalité du barème par rapport à certaines dispositions juridiques internationales spécialisées.

Malgré les deux avis de la Cour de cassation du 17 juillet 2019 en faveur de la conformité du dispositif d’indemnisation aux préconisations des textes internationaux, le Conseil des Prud’hommes de Troyes a décidé d'écarter l’application du barème dans sa décision du 29 juillet de la même année.

Dans un arrêt du 6 septembre 2023, la Cour de cassation a confirmé à nouveau la validité du dispositif. Elle rappelle aux juridictions qu’elles n’ont pas à réaliser à un contrôle de conventionnalité « in concreto » du texte avant de l’appliquer. Le Conseil des Prud’hommes ou la Cour d’appel doit respecter scrupuleusement les minimums et maximums prévus par le droit du travail français en vigueur au moment de la fixation de l’indemnité. La juridiction ne doit pas s'écarter du barème parce qu’elle cherche à octroyer une indemnisation adéquate et appropriée du préjudice subi par le salarié.